La Confédération Africaine de Football, un manque de pro-activité préjudiciable.

Avec l’avènement de Patrice Motsepe à sa tête, les aficionados du football africain ont cru que la CAF allait pouvoir mettre fin à des comportements erratiques qui ont toujours suscité de vives polémiques sur le continent et ailleurs. Mais, force est de constater qu’on est encore loin de l’efficience et de l’efficacité que l’on souhaite ardemment au niveau de la Confédération Africaine de Football.

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A quand une CAF proactive et performante? La question mérite d’être posée, tant les derniers événements qui meublent la 33ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) laissent perplexe plus d’un observateur du football africain. En témoigne, le match de toutes les polémiques que constitue le 8è de finale de la CAN qui a vu les Lions indomptables du Cameroun s’opposer aux Cœlacanthes des Comores (surnom de l’équipe qui le tient d’un poisson à nageoires charnues) soldé par un score de 2-1 en faveur du pays hôte.

En effet, de nombreux observateurs ont tôt fait de crier au scandale et bien malgré eux, les Camerounais n’ont pas manqué aussi d’en recevoir pour leur grade. Il faut dire que les Lions indomptables ont su profiter indubitablement de plusieurs faits favorables pour coiffer les Comores. Déjà critiquée de toutes parts avant la rencontre, la Confédération africaine de football a été résolument pointé du doigt pour sa douteuse organisation.

Dans un premier temps, les Comoriens n’ont pas bénéficié d’escorte policière, comme cela devrait être le cas, pour rallier le stade « OLEMBE » de Yaoundé. Ainsi, englué dans le trafic, leur bus a du faire face à des embouteillages. Les néophytes de la CAN n’ont pas eu d’autres choix que de se préparer dans le bus du fait du retard pris. Il est évident que cette première fausse note n’a pas permis aux poulains du sélectionneur Amir Abdou d’être dans les meilleures dispositions pour préparer la rencontre. Ce véritable couac est venue s’ajouter à la triste polémique du gardien de but.

En effet, pour bien comprendre l’étrange comportement de la CAF envers les Comores, il faut se rappeler que deux jours plus tôt, l’équipe a appris que douze membres de l’effectif ont été touchés par le Covid. Outre le sélectionneur Amir Abdou, plusieurs  titulaires sont concernés et surtout les deux gardiens que sont Moyadh Ousseini et Ali Ahamada. Le troisième Salim Ben Boina était déjà hors circuit du fait d’une blessure contractée lors de la phase de groupe. Bien que le jour du match, Ahamada ne soit plus positif, la CAF refuse qu’il soit aligné.

Elle informe l’équipe que les joueurs positifs devront s’isoler cinq jours. C’est l’incompréhension totale chez les Comoriens d’autant plus que le 17 janvier, veille du troisième match de groupe face au Ghana (remporté 2-3), un titulaire a été testé positif, selon le sélectionneur, alors même qu’un autre prélèvement, effectué plusieurs heures avant la rencontre et qui s’est montré négatif lui a permis de jouer face aux Black Stars. Mieux, les Comores se demandent aussi, pourquoi la Tunisie a pu « avoir une dérogation de la CAF pour Wahbi Khazri (entré en jeu dimanche 23 janvier contre le Nigeria) moins de cinq jours après avoir été testé positif ».

Intraitable, l’instance reste arcboutée sur sa décision. Résultat, les Comores ont dû affronter le Cameroun sans un vrai gardien. Ce rôle est confié à Chaker Alhadhur, défenseur de l’AC Ajaccio, en Ligue 2 française, qui a dû utiliser du scotch pour changer le numéro de son maillot. Cette situation pour le moins ubuesque n’a pas manqué de faire réagir le principal concerné: « C’était inédit, je ne sais pas si on a déjà assisté à une situation comme celle-ci dans le football. Je me suis demandé, mais qu’est-ce que je fais là ? Après, ça s’est fait naturellement”.

Le milieu comorien et buteur du soir, Youssouf M’Changama, fera remarquer plus tard en zone mixte : «Je veux faire passer un petit message à la CAF : il y a des règles, mais on est tous dans le Covid, il y a des adaptations partout. C’est inadmissible qu’on ne s’adapte pas à notre situation, il nous manquait un gardien !»

A Tout cela, il faut ajouter le fameux carton rouge de la 7ème minute, qui selon certains spécialistes peut se justifier, mais qui en définitif a faussé un peu plus le sort de la rencontre et bien évidemment, l’arrêt du match par l’arbitre sur une ultime offensive des Cœlacanthes.

S’il est vrai que ces nombreux faits défavorables auraient pu faire perdre tout contrôle aux joueurs du sélectionneur Amir Abdou, les Comoriens qui participent à leur première CAN, ont su garder leur sang-froid acceptant de quitter la compétition sans faire de vague mais remplis de fierté. «On savait que ça allait être compliqué. … Maintenant, je vais retenir que du positif, franchement que du positif. Je pense qu’on peut sortir de cette compétition dignement, avec la tête haute. On a fait ce qu’on a pu, on n’a pas démérité. On ressort très fiers», dira le valeureux Alhadhur, au micro de la chaîne beIN Sports.

Du reste, nombreux sont les spécialistes qui ont salué la prestation héroïque des Comoriens, privés de gardiens et de préparation d’avant-match. Les journalistes sont unanimes: les Comores sortent avec les honneurs! Grand connaisseur du football africain, Patrick Juillard partage ce constat et se montre acerbe envers l’instance dirigeante du football africain sur le réseau social Twitter: «La CAF s’en est mesquinement tenue à son règlement. Elle se serait grandie à faire preuve de souplesse, pour le football et pour l’image de sa compétition phare. Au lieu de quoi, le bêtisier de cette CAN va s’enrichir d’un nouveau chapitre peu glorieux».

Une crédibilité entamée

Actuellement, parler d’image écornée pour la CAF est un doux euphémisme tant les critiques pleuvent sur l’instance. Et comme si cela ne suffisait pas, en marge de la rencontre Cameroun – Comores, la soirée a pris une allure bien plus tragique en raison du décès de huit personnes dans un mouvement de foule aux abords du stade d’Olembé qui été aussitôt suspendu par la CAF dont le président a exigé une enquête rapide sur la bousculade.

Mardi dernier, le Secrétaire général de l’instance, Veron Mosengo-Omba a réagi en conférence de presse par rapport aux douteux tests Covid en faisant comprendre que c’est un cabinet indépendant et fiable, en l’occurrence UNILAB, qui gère les tests: « Il a eu la responsabilité de conduire des tests lors de l’Euro et lors de la Coupe Arabe de la FIFA. Donc, c’est ce laboratoire qui est venu ici avec ses propres matériels et qui conduit des tests pour les équipes, les joueurs et les officiels ».

Par la suite, interrogé sur l’inattendu changement de règlement, qui a empêché les Comores d’aligner leur gardien Ali Ahamada, le SG de la CAF s’est montré plutôt évasif. «La commission médicale de la CAF a décidé de réajuster les règles, notamment l’une qui veut, qu’après avoir été testé positif, après cinq jours, on fait des tests cardiovasculaires pour pouvoir jouer si on est négatif. C’est important de faire ces tests parce, qu’après le Covid, on ne peut pas laisser les joueurs retourner sur le terrain comme ça», a éludé Veron Mosengo-Omba sans pour autant expliquer clairement si les différentes sélections ont été averti de ce changement et si oui, quand?

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